đŸŽ™ïž Asthme et bactĂ©ries pulmonaires : les explications de Muriel Thomas

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Des chercheurs de l’INRA ont montrĂ© pour la premiĂšre fois que les bactĂ©ries pulmonaires pouvaient exagĂ©rer ou diminuer les symptĂŽmes de l’asthme. Muriel Thomas, directrice de recherche et co-auteure de l’étude, nous en dit plus sur cette dĂ©couverte majeure.

Des travaux menĂ©s par des chercheurs de l’INRA et de l’UniversitĂ© de Gand (Belgique), publiĂ©s dans The ISME Journal ce 3 janvier 2017, montrent que des bactĂ©ries prĂ©sentes dans les poumons pouvaient attĂ©nuer certaines pathologies respiratoires comme l’asthme, ou au contraire les exacerber. Muriel Thomas, directrice de l’UnitĂ© mixte de recherche Microbiologie de l’alimentation au service de la santĂ© et co-auteure de cette Ă©tude nous en dit davantage.

Qu’appelle-t-on microbiote ? De quand date la dĂ©couverte du microbiote pulmonaire et comment a-t-il Ă©tĂ© mis en Ă©vidence ?

“Un microbiote est un ensemble de microorganismes. Pour les microbiotes humains, ce sont majoritairement des bactĂ©ries mais il peut y avoir d’autres microorganismes comme des levures ou des virus. Les premiĂšres publications faisant Ă©tat d’un microbiote pulmonaires datent de 2010.

On savait que l’on pouvait avoir des bactĂ©ries dans les poumons, la tuberculose Ă©tant due Ă  une bactĂ©rie, mais ce phĂ©nomĂšne restait associĂ© Ă  des pathologies. Ce qui est nouveau, c’est de proposer qu’il y a une communautĂ© de microorganismes dans les poumons qui n’est pas associĂ©e Ă  des maladies et qui pourrait mĂȘme aider Ă  lutter contre certaines maladies. Â»

Pouvez-vous nous détailler les différentes étapes de ces travaux entre microbiote pulmonaire et asthme, notamment au niveau expérimental ? A quels résultats avez-vous abouti ?

« Tout a Ă©tĂ© menĂ© via l’expĂ©rimentation sur souris, il n’y a pas de volet humain. C’est de la recherche fondamentale Ă  visĂ©e applicative.

Nous avons tout d’abord recueilli les bactĂ©ries prĂ©sentes dans les poumons de souris Ă  diffĂ©rents stades aprĂšs la naissance. On a ensuite fait la mĂȘme chose avec des souris Ă  qui on avait fait inhaler un allergĂšne respiratoire dans le but de dĂ©velopper un asthme allergique.

On a observĂ© que les souris qui dĂ©veloppaient de l’asthme avaient un nombre de bactĂ©ries, notamment de staphylocoques, trĂšs augmentĂ©. Nous avons supposĂ© que ces bactĂ©ries pouvaient avoir un effet dĂ©lĂ©tĂšre et aggravateur de la maladie.

Nous avons aussi dĂ©couvert que les poumons Ă©taient capables de rĂ©agir diffĂ©remment selon les bactĂ©ries et on a pu sĂ©lectionner des bactĂ©ries ayant un effet potentiellement modĂ©rateur de l’asthme.

Nous avons alors refait des essais sur l’asthme chez la souris en prĂ©sence de l’une ou l’autre de ces bactĂ©ries. RĂ©sultat : les animaux ayant inhalĂ© les bactĂ©ries dĂ©lĂ©tĂšres Ă©taient plus malades que les autres et les animaux ayant inhalĂ© les bactĂ©ries supposĂ©es protectrices avaient un asthme attĂ©nuĂ©. » 

« On en a dĂ©duit que les bactĂ©ries qui vivent dans les poumons varient selon la santĂ© respiratoire et qu’elles peuvent avoir un rĂŽle dans la susceptibilitĂ© Ă  l’asthme. » 

Auriez-vous pu aboutir Ă  ces mĂȘmes rĂ©sultats sans utiliser de modĂšle animal ?

« Nous n’aurions pas pu arriver Ă  ces rĂ©sultats sans modĂšle animal, puisqu’il nous fallait obtenir des bactĂ©ries in situ, Ă  savoir des bactĂ©ries vivant dans les zones profondes des poumons. Ce n’aurait pas Ă©tĂ© possible chez l’homme ou en culture cellulaire. De plus, nous avons pu Ă©tudier les poumons de souris Ă  diffĂ©rents stades de la vie. »

Quelles sont les prochaines Ă©tapes ? A quoi cette recherche fondamentale peut-elle aboutir ?

« DĂ©sormais, nous allons essayer de mener ce type de recherche sur d’autres pathologies pulmonaires, de mieux comprendre les mĂ©canismes d’action, de trouver d’autres bactĂ©ries d’intĂ©rĂȘt pour d’autres pathologies respiratoires, de savoir si le microbiote intestinal peut avoir aussi un impact, puisque tous les microbiotes communiquent entre eux. Il reste beaucoup Ă  dĂ©couvrir. »

Comme dans le cadre du microbiote intestinal, cette recherche pourrait aboutir Ă  des applications thĂ©rapeutiques telles que des probiotiques oraux ou Ă  inhaler qui agiraient sur le microbiote pulmonaire et sur l’intensitĂ© de l’asthme.

Propos recueillis par HĂ©lĂšne Bour

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