L’expérimentation animale est souvent perçue comme une activité visant uniquement à améliorer la santé humaine. Or, les animaux de compagnie et d’élevage bénéficient aussi des avancées découlant de la recherche animale, dans le domaine chirurgical notamment. Zoom sur ce qu’elle a apporté à nos chiens et chats.
Dans l’imaginaire commun, la recherche animale est souvent perçue comme une activité que l’homme inflige aux animaux pour son seul intérêt, afin d’améliorer la santé et le quotidien des humains. C’est en tout cas ce que veulent parfois faire croire certains des détracteurs de l’expérimentation animale.
En réalité, les animaux de compagnie comme ceux d’élevage ont bénéficié et bénéficieront des découvertes et améliorations issues de recherches sur animaux.
Fièvre aphteuse, fièvre porcine, encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) également appelée « maladie de la vache folle » sont quelques unes des pathologies représentant un défi pour les chercheurs, qui tentent de mettre au point des traitements et vaccins afin de protéger les élevages.
Quant aux chiens et chats, animaux de compagnie préférés des Français, ils sont de mieux en mieux pris en charge par les vétérinaires, aussi bien au niveau chirurgical que médicamenteux, et ce en grande partie grâce à des recherches conduites chez l’animal.
Tour d’horizon de quelques avancées qui ont bénéficié à nos fidèles compagnons à quatre pattes.
Un diagnostic plus performant
C’est la première étape avant l’élaboration d’un traitement, autrement dit une étape essentielle pour la prise en charge de l’animal. Et si les hommes bénéficient de nouvelles techniques telles que l’IRM, le scanner (tomodensitométrie), les rayons X etc., c’est aussi le cas de nos animaux de compagnie. Or, ces outils de diagnostic ont bel et bien été élaborés et testés sur des animaux. L’exemple le plus parlant est sans doute celui du diagnostic de pathologie cardiaque congénitale. Celui-ci s’effectue principalement par échocardiographie, autrement dit par échographie du coeur. Cette technique, aujourd’hui aussi bien pratiquée chez l’animal que chez l’homme, a été mise au point via des expérimentations sur animaux, principalement sur des mammifères quadrupèdes (veaux, porcs, lapins, rongeurs).
La tétralogie de Fallot, qui se caractérise par quatre défauts cardiaques, est une pathologie cardiaque congénitale cyanogène, dont le diagnostic s’effectue par échocardiographie, méthode qui a l’avantage d’être non-invasive. Une fois détectée, cette malformation doit être traitée par chirurgie, et là encore, la recherche animale a joué un rôle important.
Des chirurgies améliorées
La chirurgie de la tétralogie de Fallot, appelée anastomose ou shunt de Blalock-Taussig, est une intervention palliative qui atténue les conséquences de la malformation, et qui est souvent pratiquée dans l’urgence avant une chirurgie cardiaque plus lourde. Elle consiste à dériver une partie du flux sanguin aortique vers la circulation pulmonaire, pour diminuer la cyanose et améliorer l’oxygénation du sang. Or, cette opération délicate a été mise au point avec succès sur environ 200 chiens de laboratoire par Alfred Blalock, Helen Taussig et Vivien Thomas, avant d’être adaptée à l’homme. Mais elle a aussi bénéficié aux animaux domestiques atteints de tétralogie de Fallot, et a été améliorée et peaufinée. Comme la tétralogie de Fallot, nombre de pathologies cardiaques bénéficient actuellement de traitements issus de recherches sur animaux, principalement sur des mammifères.
Dans le domaine de la chirurgie, d’autres exemples peuvent être cités, notamment celui de la transplantation rénale. Pratiquée chez le chien et le chat dans les cas d’insuffisance rénale grave, la transplantation d’un rein a été expérimentée pour la première fois au 20è siècle, sur des modèles animaux. Des options chirurgicales sont également envisageables en cas d’hyperthyroïdie, de tumeur, de cataracte ou encore de dysplasie de la hanche… Ces affections ont été étudiées en laboratoire sur des animaux tels que les souris, lapins, chiens, chats ou encore macaques pour mettre en place des chirurgies efficaces.
Trois classes de médicaments majeurs
Du côté des médicaments et des vaccins, le constat est le même : les avancées issues de la recherche animale dont l’homme a pu bénéficier ont également amélioré le traitement de nos animaux de compagnie.
Les trois principaux types de médicaments développés via l’expérimentation animale bénéficiant actuellement aux chiens et chats sont les antidouleurs, les médicaments traitant les troubles mentaux et les antidiabétiques.
Ainsi, les médicaments analgésiques à base de doliprane et d’hydrocodone tels que le Vicodin ont par exemple été mis au point suite à des recherches conduites sur des chats et des lapins.
Côté neurologique, le médicament le plus connu mis au point sur des modèles animaux et utilisé chez les chiens et chats est le Prozac. Celui-ci est notamment prescrit dans le traitement des troubles compulsifs canins, proches des troubles obsessionnels compulsifs (TOC) observés chez l’homme. Cet inhibiteur sélectif de la recapture de la sérotonine a été développé lors d’études conduites sur des rongeurs, et est actuellement utilisé dans le traitement de plusieurs pathologies neurologiques telles que l’anxiété, la dépression, les TOC ou encore les troubles de panique.
Quant au diabète, il est actuellement traité, chez les chiens et chats comme chez l’homme, par des médicaments à base d’insuline. Celle-ci a été isolée pour la première fois chez le chien, puis expérimentée comme traitement sur des lapins.
Et la liste des médicaments aujourd’hui prescrits aux animaux de compagnie et issus de la recherche animale est encore longue : anti-rejets, antibiotiques, anti-convulsifs, anticancéreux, …
Des vaccins essentiels
Concernant les vaccins, l’exemple le plus évident est celui du vaccin contre la rage. Développé à la fin du 19è siècle par Louis Pasteur, ce vaccin a été mis au point via des expérimentations sur des lapins, avant d’être administré à l’homme et à l’animal, essentiellement aux chiens. Mais la rage n’est pas la seule maladie pour laquelle l’on peut vacciner nos animaux de compagnie. Actuellement en France, sept vaccins sont recommandés (voire obligatoires dans certains cas) pour les chiens (rage, leptospirose, maladie de Carré…), et cinq vaccins sont conseillés pour les chats (typhus et coryza principalement). Tous ont été mis au point puis testés sur animaux de laboratoire avant commercialisation. A la fin des années 1970, une vaste épidémie de parvovirose a conduit au décès d’un très grand nombre de chiens, en Europe et en Amérique. Un vaccin contre le parvovirus a été mis au point en 1982, suite à des études conduites sur des chiens de laboratoire, et celui-ci est désormais administré à la plupart des chiots, dès la cinquième semaine ou la septième semaine selon l’environnement du chiot. Comme chez l’homme, la vaccination demeure le moyen le plus simple de lutter contre les maladies fortement contagieuses pour lesquelles le traitement demeure compliqué voire inexistant. Elle permet de protéger l’individu mais aussi d’éradiquer la maladie au sein d’une population.
De manière générale, rares sont les découvertes médicales issues de la recherche animale qui n’ont pas bénéficié aux animaux, qu’ils soient d’élevage ou de compagnie. Pacemaker, lentilles de contact, prothèses dentaires… Chiens et chats peuvent désormais eux aussi bénéficier de dispositifs médicaux, là encore mis au point sur des animaux de laboratoire.
L’expérimentation animale est donc loin d’être uniquement destinée à l’homme, et améliore aussi la santé des animaux, qu’ils soient domestiqués ou non.
Hélène Bour
En savoir plus :
https://fbresearch.org/dogs-cats-benefit-animal-research/