Le 14 novembre signe la Journée Mondiale du Diabète, l’occasion de présenter les découvertes réalisées grâce aux modèles animaux et non-animaux.
Le diabète touchait environ 537 millions de personnes dans le monde en 2021 et 4,3 millions de Français cette même année (soit 6,3% de la population). Un chiffre illustre l’impact sanitaire du diabète : il s’agit de la 8ème cause de mortalité en France (donnée 2006).
Cette maladie se caractérise par un excès de sucre dans le sang, dû à l’incapacité de stocker ce sucre dans les cellules musculaires et du foie. C’est l’insuline, une hormone pancréatique, qui permet le stockage du sucre et dont le mécanisme est perturbé chez les diabétiques.
Malgré la nomination de « diabète » au singulier, il existe 2 types principaux de diabètes :
- Le diabète de type 1 : concerne 5-10% des diabétiques Français, avec une augmentation des cas de 4% par an. Le diagnostic est souvent précoce dans la vie de l’individu. Ici, le dysfonctionnement réside dans un sabotage de l’immunité contre les cellules produisant l’insuline.
- Le diabète de type 2 : concerne 90-95% des diabétiques Français. Le diagnostic se fait souvent plus tardivement dans la vie de l’individu. L’insuline est bien produite par le pancréas mais l’organisme n’y répond plus correctement.
Les diabètes, s’ils ne sont pas traités, peuvent entraîner de nombreuses autres complications, qu’elles soient cardiovasculaires, rénales ou bien visuelles. Les débuts de la recherche sur les diabètes datent du XVIIe siècle, avec un boom au milieu du XXe siècle. Les modèles animaux ont toujours eu une place prépondérante mais d’autres modèles commencent à faire leur apparition dans le monde de la recherche contre les diabètes. Mais alors, quels sont les traitements existants et comment ont-ils été découverts ?
Modèles animaux de diabète : un aperçu des approches chirurgicales, chimiques et génétiques
Les modèles animaux ont été essentiels pour comprendre les mécanismes des diabètes et tester de nouvelles thérapies. Parmi les premiers modèles, le chien a joué un rôle clé dès 1891, lorsqu’un scientifique nommé Marcel Eugene Emile Gley a réalisé une pancréatectomie (ablation du pancréas) pour induire un diabète. Dans les décennies suivantes, d’autres animaux ont été utilisés pour affiner cette approche : en 1944, un modèle de rat a été développé en retirant une grande partie du pancréas, tandis qu’en 1946, le lapin a servi à explorer les effets de la ligature du canal pancréatique, avec des résultats impliquant des changements dans les îlots de Langerhans, responsables de la production d’insuline. Ces modèles ont été progressivement remplacés par des rongeurs plus petits et plus pratiques, comme les souris et rats, utilisés en grande partie dans les années 1940. Plus récemment, dans les années 2000, le porc est devenu un modèle important pour l’étude du diabète gestationnel et pour tester de nouvelles thérapies expérimentales.
L’approche chimique a également été fondamentale. Dans les années 1940, l’alloxane a été utilisé pour détruire les cellules produisant l’insuline dans le pancréas des rongeurs, provoquant ainsi un diabète de type 1. Cette technique a été remplacée dans les années 1960 par la streptozotocine (STZ), qui cible l’ADN des ces mêmes cellules, et est toujours utilisée aujourd’hui pour induire des modèles de diabète de type 1 chez les rongeurs et certains autres animaux. Pour le diabète de type 2, des modèles combinant STZ avec un régime alimentaire riche en graisses ont été introduits dans les années 1980, créant des modèles plus complexes et proches des formes humaines de la maladie. Ces modèles ont été également adaptés à d’autres espèces, comme les poissons-zèbres et les grenouilles.
Les modèles génétiques ont permis des avancées encore plus significatives, notamment dans les années 1960, avec le hamster chinois et les porcs miniatures (minipigs). Ces espèces développent des formes naturelles de diabète de type 2. L’introduction de souris NOD dans les années 1980 a aussi marqué un tournant dans la recherche sur le diabète de type 1, en raison de leur prédisposition génétique à cette maladie. Ces modèles ont évolué pour inclure des mutations génétiques ciblées, permettant de comprendre l’impact des gènes sur la pathologie du diabète. Aujourd’hui, les modèles génétiques, se rapportant majoritairement aux modèles murins, dominent la recherche, représentant la majorité des études sur le diabète.
Les avancées des modèles organoïdes et organes-sur-puces
Parallèlement à l’utilisation des animaux, les modèles organoïdes et organes-sur-puces ont émergé comme des alternatives puissantes. Ces technologies permettent d’étudier le diabète de manière plus ciblée et en utilisant des systèmes plus proches des conditions humaines, grâce en premier lieu à l’utilisation de cellules humaines.
Le concept de puce de tissu adipeux a vu le jour en 2019 pour simuler l’obésité et le diabète de type 2. Cette puce recrée les conditions d’inflammation dans les cellules graisseuses humaines, un facteur clé du diabète. Des recherches récentes ont également permis de concevoir des puces microfluidiques pour étudier l’inflammation et la résistance à l’insuline, une condition liée à l’obésité.
En parallèle, des modèles rénaux sur puce ont été développés au début des années 2010 pour simuler la néphropathie diabétique, l’une des complications les plus courantes du diabète. Ces dispositifs microfluidiques imitent les premiers stades de cette maladie en reproduisant les environnements glomérulaires et tubulaires du rein. D’autres avancées ont permis de créer des glomérules sur puce avec des cellules humaines, permettant de mieux comprendre la réponse aux traitements.
Le pancréas sur puce, introduit en 2016, a également permis des progrès importants dans la compréhension des fonctions pancréatiques, notamment la régulation du glucose. En 2020, des modèles combinant le pancréas et le foie ont été créés pour étudier l’interaction entre ces deux organes dans le métabolisme du glucose.
Ces modèles d’organes-sur-puces sont particulièrement utiles pour tester l’efficacité des médicaments, car ils permettent d’analyser les effets sur des systèmes complexes, tout en réduisant le recours aux animaux (qui restent utiles pour franchir le dernier degré de complexité : l’organisme vivant entier). De plus, l’utilisation de cellules iPSC (cellules souches pluripotentes induites) dans ces modèles permet de personnaliser les recherches et d’adapter les traitements aux spécificités des patients, ouvrant ainsi de nouvelles perspectives pour la médecine de précision dans le traitement du diabète.
Une complémentarité des modèles
En 1923, le Prix Nobel de Médecine était décerné à Frederic Grant Banting et John James Richard Macleod pour la découverte de l’insuline, notamment grâce à l’utilisation de chiens. Là où les progrès importants dans le développement des méthodes alternatives est applaudi, il reste essentiel de mener des études sur des modèles animaux pour s’assurer de la sécurité des futurs traitements et pour pouvoir étudier un organisme dans sa globalité.