Un dispositif recréant l’environnement du fœtus pendant la grossesse a été testé avec succès sur des agneaux. Il pourrait permettre de prendre en charge les prématurés extrêmes, dont le taux de survie est encore très bas.
En France, on estime qu’entre 50 000 et 60 000 enfants naissent prématurément chaque année, c’est-à-dire avant la 35ème semaine de grossesse, la durée d’une grossesse à terme étant de 39 semaines. Parmis ces prématurés, on distingue les prématurés moyens (30-35 semaines), les grands prématurés (26-30 semaines), et les extrêmes prématurés, nés à moins de 26 semaines de grossesse. Ces derniers ont un taux très élevé de mortalité (50%) et ont 90% de risque de séquelles du fait notamment de l’immaturité de leurs poumons.
Pour augmenter la survie de ces extrêmes prématurés, une équipe de recherche de l’Hôpital pour enfants de Philadelphie a mis au point un utérus artificiel recréant l’environnement du fœtus durant la grossesse.
Le prématuré, davantage un fœtus qu’un nouveau-né
Partant du postulat qu’un bébé né extrêmement prématuré était plus proche du stade fœtal que du stade de nouveau-né, ils ont créé un dispositif permettant au prématuré de poursuivre son développement presque comme s’il était encore dans l’utérus de sa mère.
Le dispositif se décompose en deux grandes parties :
- une poche en plastique remplie d’un fluide proche du liquide amniotique, filtré par une pompe, et contenant des nutriments et molécules pour stimuler la croissance ;
- un système circulatoire relié à un oxygénateur, qui alimente le sang du fœtus en oxygène, via son cordon ombilical.
Un développement fœtal proche de celui de l’Homme
Pour tester ce modèle, les chercheurs ont utilisé huit agneaux nés prématurément, à un stade équivalent à 23-24 semaines de grossesse chez l’Homme, en particulier au niveau de la maturité des poumons.
Le modèle mouton a été privilégié ici notamment parce que “la plupart des choses que l’on sait actuellement sur le développement fœtal sont issues de recherches menées sur le mouton”, explique Alan W.Flake, co-auteur de l’étude. “La majorité des données physiologiques de ces 50 à 60 dernières années concernant la circulation fœtale et le développement du fœtus ont été obtenues via des expériences sur le mouton.” De plus, le fœtus de mouton a un développement pulmonaire proche de celui du fœtus humain.
Nés par césarienne, les huit moutons de l’étude ont ensuite été placés dans ces poches quelques minutes seulement après leur naissance. Verdict : les agneaux ont pu évoluer et se développer normalement dans ce dispositif, et ce jusqu’à 4 semaines du terme. Aucune anomalie du circuit n’a été constatée, ce qui laisse penser que ce modèle expérimental pourrait être utilisé pendant plus d’un mois.
Un essai clinique envisagé dans les prochaines années
Si les agneaux nés de cette expérience se portent bien au niveau physique, leur état psychologique et les effets cognitifs et neurologiques à long terme demeurent inconnus, faute de tests permettant d’évaluer ces critères chez le mouton. Ce modèle a donc des limites que les chercheurs devront parvenir à surmonter.
Optimiste, l’équipe est d’ores et déjà en discussion avec la Food and Drug Administration des Etats-Unis pour mettre en place des essais cliniques chez l’humain. Ils pourraient avoir lieu dans les deux prochaines années.
Hélène Bour
En savoir plus :
https://www.inserm.fr/information-en-sante/dossiers-information/prematurite